Faire son potager, c’est s’ancrer à la terre, mais en même temps s’envoler…
Suspendre le temps, couper la petite ficelle qui retenait le ballon, et décoller avec lui vers une bulle de bonheur, un univers fait de chants d’oiseaux, de verdure, de chapeaux de paille, de fragrances subtiles et boisées. Un espace où verveine citronnée côtoie basilic et thym, menthe et estragon relèvent le parfum lourd et capiteux des fraises.
Les papillons dansent sous le regard besogneux des abeilles et des coccinelles…
Un délicieux lâcher prise s’installe et génère en nous un sentiment de bien-être et de gratitude.
Gratitude envers notre terre nourricière tout d’abord, mais aussi envers nous-même, car lorsque la magie opère, que notre créativité et notre travail nous procurent la satisfaction immense de voir pousser le fruit de nos efforts, les mots nous manquent pour décrire ce doux sentiment de plénitude qui prend le contrôle de tout notre être.
C’est ainsi que travailler au jardin permet, sans vraiment s’en rendre compte, de réparer une estime de soi parfois un peu cabossée…
Planter c’est donner la vie, et laisser l’histoire s’écrire … Car, au risque de faire mentir l’adage, on ne récolte pas toujours ce que l’on sème…
La terre nous apprend l’humilité, le goût du travail bien fait, la rigueur, mais aussi la fantaisie et l’audace, la patience.
Ici pas de certitudes, pas de logique, pas de dogmes. Donner de l’eau, du soleil, et de l’amour, ne suffit pas toujours à faire éclore, grandir et mûrir.
Non.
Parfois trop d’amour étouffe, trop d’eau inonde, trop de soleil dessèche…
Et puis il y a ceux que l’on n’avait pas conviés, les impondérables, les « tant redoutés » …Ces anges noirs venus de là-haut, pour nous mettre à l’épreuve et tester notre degrés d’engagement…Tantôt appelés pluies diluviennes, gelées tardives ou grêles dévastatrices…Mais aussi ces nuisibles venus d’en bas, champignons, insectes volants ou rampants, rongeurs maléfiques…
Le jardin, c’est l’apprentissage de la vie, pas facile, il faut apprendre à composer avec l’écosystème, la lune et ses humeurs, le soleil et ses absences…
Mais lorsque l’équilibre est atteint, lorsque le légume sort de terre, ou lorsque la graine fait fleurir la vie, alors la magie opère, encore et encore comme si c’était la première fois …
Notre coeur s’illumine, on retient notre souffle, émerveillés par la beauté du cycle immuable de la vie…
On se surprend alors à rêver de banquets, d’assiettes gourmandes, pour décliner, marier, associer, déguster et surtout partager, ces saveurs fraîchement cueillies.
Ces récoltes sont uniques en ce qu’elles renferment en elles l’ADN de l’univers tout entier et l’empreinte secrète et exclusive du jardinier qui leur a donné vie…
Le potager cultive l’inspiration, et cela commence avec les fleurs de courgettes qui poussent un peu partout dans mon jardin en ce moment. Mais il faut faire vite, et les cueillir avant qu’elles ne fanent pour leur trouver une manière délicieuse et saine de les accommoder, et j’ai une idée qui devrait vous plaire 😉
Avez-vous déjà goûté aux fleurs de courgettes? C’est un pur délice, même juste cuites à la vapeur avec un filet de très bonne huile d’olive, et un peu de fleur de sel…
A Nice, il est d’usage de les cuisiner en beignets. Mais, fritures et estomacs sensibles ne font pas toujours bon ménage, alors pourquoi ne pas envisager une version plus « healthy » et digeste, simple et gouteuse?
L’idée c’est de les farcir avec une céréale, pour en faire un plat complet, j’ai choisi du quinoa, mais cela fonctionne tout aussi bien avec du riz brun, noir, ou rouge, du millet, du blé concassé, si vous tolérez le gluten….
Pour ce qui est de l’approvisionnement en matière première, si vous n’habitez pas dans le Sud Est de la France, à la campagne ou en Italie, pas de panique, les filles, je vous conseille d’aller faire un petit tour chez « Grand Frais » cette enseigne propose chaque été les jolies fleurs, par paquets de 10 pour un peu plus de 2 euros.
Pour ce qui est de la technique de « farce », il suffit de maintenir la fleur dans la main gauche (si vous êtes droitière), d’écarter délicatement les pétales à l’aide de votre main droite, et au moyen d’une cuillère à café, farcir en douceur la fleur, et de la refermer pour empêcher la farce de s’échapper…
Dernière petite précision, pour une version végan on oubliera :
- les crevettes
- l’oeuf, remplacé par 2cc de graines de chia qui auront reposé au moins 10 minutes dans 2 à 3 cs d’eau.
- et le fromage de chèvre, remplacé par une crème végétale (riz ou soja).
En cas d’intolérance au lactose, sachez quand même que plus les fromages de chèvre sont affinés, moins ils présentent de traces de lactose. En effet, celui-ci est dégradé durant le processus de maturation jusqu’à disparaitre complètement.
Bon, maintenant que tout est clair, let’s go !
Ce qu’il me faut :
- 10 fleurs de courgettes
- 1 oeuf (ou 2 cc de graines de chia pour 2-3 cs d’eau environ, trempées 10 minutes).
- 100 g de quinoa cuit
- 10 petites crevettes roses bio
- 1 petit fromage de chèvre crémeux (ou 3 cs de crème de riz )
- des herbes fraîches (coriandre, menthe…)
- sel et poivre
- des graines (lin, chanvre, courge, tournesol…)
- de l’huile d’olive
C’est parti !
- on commence par la cuisson du quinoa, en le rinçant abondamment pour éliminer les résidus d’insecticides naturels qui enveloppent sa graine et la rendent amère. Dans une casserole, on verser le quinoa et environ deux fois son volume d’eau, on porte à ébullition et laisse cuire à couvert et sur feu doux jusqu’à ce que l’eau soit absorbée, soit 10 à 15 minutes.
Ensuite on coupe le feu et laisser gonfler à couvert encore 10 minutes. - Dans un saladier on mélange l’oeuf battu avec le fromage de chèvre ou la crème végétale, on sale et on poivre, et on ajoute les herbes ciselées, on peut aussi râper un centimètre de gingembre. On ajoute ensuite le quinoa et les petites crevettes coupées en 2 et enfin les graines pour le côté crunchy.
Version « white quinoa »
Version « black quinoa »…
Voilà, les consignes sont données alors à vos marques, prêts, farcissez !
Il ne reste plus qu’à manipuler avec beaucoup d’amour et de tendresse nos jolies petites fleurs.
- tout d’abord on les rince soigneusement et on les fait sécher sur un torchon propre
- on les ouvre délicatement et on enlève (ou pas les 2 écoles coexistent) le pistil.
- il ne reste plus qu’à déposer 2 cc de farce et refermer doucement la fleur avant de la placer sur une plaque allant au four recouverte de papier cuisson.
- On arrose copieusement d’huile d’olive et hop au four pour une quinzaine de minutes à 150°. Mais n’hésitez pas à ouvrir la porte du four pour surveiller, il faut qu’elles soient juste rôties …
Préparer ensuite une petite sauce avec :
- 4 c.s. de tahini
- quelques gouttes de jus de citron
- 1/2 gousse d’ail, très finement hâchée
- sel, poivre
Un coulis de tomates fraîches, ou une purée de courgettes, feront aussi tout aussi bien l’affaire si vous n’avez pas de tahini, et si votre potager regorge de légumes mûrs…
Il ne reste plus qu’à dresser dans une belle assiette et déguster, tiède ou frais, pour un diner léger, mais original et savoureux.